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LES FANTOMES EN GENERAL
Témoins muets des passions et des intrigues qu'ils ont abrités pendant des
générations, certains lieux semblent habités par les ombres du passé. Le long des
couloirs et des chemins de ronde de châteaux ouverts à tous les vents, dans le linceul
de brume des antiques demeures enténébrées et pourrissantes, il est de vieux méfaits,
des injustices, des regrets qui semblent s'accrocher aux pierres entre lesquelles
battirent les curs qu'ils tourmentèrent.
Les histoires de demeures hantées remontent à la nuit des temps. Pour
certains spécialistes des phénomènes métapsychiques, ce sont bien des fantômes qui
hantent les maisons, même s'il ne s'agit que de persistances nébuleuses d'images liées
à des émotions fortes ou à des événements néfastes. C'est ainsi qu'en 1908 le
physicien sir Oliver Lodge émit l'idée que les manifestations spectrales consisteraient
en "représentations fantomatiques de tragédies fort anciennes". Il n'est pas
le seul à penser que de violentes émotions peuvent laisser sur l'environnement une sorte
d'empreinte transmissible dans le futur à des individus suffisamment sensibles pour la
réactiver.
Cela expliquerait que les légendes de maisons hantés soient fortement
chargées d'émotions. Les fantômes apparaissent souvent pour annoncer des catastrophes
ou évoquer des êtres trop passionnés pour avoir pu trouver le repos dans l'au-delà -
des êtres tourmentés par la luxure, le remords, une soif de justice ou le besoin de
rejouer indéfiniment la tragédie d'un amour impossible.
Les lieux hantés
Parmi les phénomènes classiques figure l'apparition d'une personne ou d'un animal,
apparition qui se renouvelle généralement au même endroit, et est perceptible par un ou
plusieurs individus mais pas par tout un chacun. D'après les descriptions qui en sont
données, il peut s'agir aussi bien de spectres ténus entr'aperçus que de personnages
d'une indubitable présence.
Dans le phénomène du lieu hanté, l'apparition est bien davantage associée
au lieu qu'à tel ou tel sujet. Il arrive que plusieurs personnes la perçoivent sans
qu'aucune d'elles ne puissent lui attribuer un nom. Il arrive cependant qu'on trouve à un
tel fantôme une ressemblance avec un défunt connu. Un autre élément important
permettant de qualifier un lieu hanté est la présence d'un bruit imitant celui que
produirait une activité humaine, comme les bruits de pas, par exemple. Il existe biens
d'autres impressions fréquemment mentionnées dont certaines odeurs particulièrement
fortes, notamment sulfureuses, ou un froid singulier régnant dans certaines parties de la
maison.
L'une des plus anciennes allusions à des lieux hantés remonte au Ve siècle
avant J.C. et fait état du spectre du général spartiate Pausanias: coupable de
trahison, il avait cherché refuge dans un temple d'Athena, où on le laissa mourir de
faim; son fantôme terrorisa les fidèles fréquentant le temple par des bruits
surnaturels, jusqu'à ce qu'un nécromant l'exorcise. Il ne fait aucun doute que certains
lieux étaient au IVe siècle avant notre ère clairement répertoriés comme hantés,
quand Platon évoquait dans ses écrits "L'âme qui survit au corps". Parfois,
note-t-il, l'âme revêt "une enveloppe terrestre qui la rend pesante et visible et
la fait descendre jusque dans les régions de la visibilité... Et ainsi ces âmes
errantes hantent, comme nous le disons, les tombeaux et les monuments élevés aux morts,
auprès desquels on voit parfois de tels fantômes."
Les siècles n'ont pas changé grand-chose aux phénomènes attribués aux
lieux hantés. Des enquêtes menées dans les années 70 aux Etats-Unis, en
Grande-Bretagne et en Islande firent apparaître que de 9 à 17% des personnes
interrogées affirmaient avoir été les sujets d'expériences insolites au cours
desquelles elles avaient perçu, par la vue, l'ouïe ou le toucher, ce qui semblait être
un être vivant ou un objet inanimé, alors que rien de tel n'était en réalité
présent. Et, pour la plupart des sujets affirmant avoir été témoin d'une apparition,
celle-ci s'était manifestée dans leur propre maison et non dans l'un des lieux
inquiétants et voilés de toiles d'araignée que l'imagination populaire se représente
le plus volontiers comme hantés.
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